5 Mars 2018
Si vous partez en voyage dans un pays hors de l’UE et que vous désirez rapporter ou y emporter des orchidées, vous devrez au préalable faire quelques démarches administratives.
En effet, le commerce des orchidées est règlementé à trois niveaux. Il devra tout d’abord répondre aux normes imposées par la CITES. Il vous faudra également tenir compte de la règlementation plus stricte de l’UE ainsi que des législations nationales des pays d’exportation et d’importation. Les documents nécessaires devront être présentés aux services de douane avant que les spécimens ne soient expédiés.
La CITES
Appelée parfois Convention de Washington, la CITES ou Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages, menacées d’extinction est un accord international entre Etats qui a pour but de veiller à ce que le commerce international des spécimens d’animaux et de plantes sauvages ne menace pas la survie des espèces auxquelles ils appartiennent. La CITES est née en 1973 mais n’est entrée en vigueur qu’en 1975. La Belgique y adhère depuis 1984.
Aujourd’hui la CITES confère une protection à plus de 35.000 espèces sauvages animales et végétales. Depuis sa mise en application aucune espèce protégée n’a disparu suite au commerce.
Les Etats qui rejoignent la CITES sont appelés « Parties ». La CITES compte actuellement 183 Parties.
Chaque Partie est tenue d’appliquer la CITES et doit adopter une législation nationale garantissant le respect de la Convention au niveau national. Toute importation, (ré)exportation de spécimens d’espèces couvertes par la CITES n’est autorisée que dans le cadre d’un système de permis. Les spécimens des espèces protégées sont : les animaux ou les plantes, vivants ou morts, toutes parties de ces animaux ou de ces plantes ainsi que tous produits tirés de ces animaux ou de ces plantes. Chaque Partie doit désigner au moins un organe de gestion chargé d’administrer le système de permis et une autorité scientifique qui lui donne son avis sur les effets du commerce sur les espèces.
Les espèces couvertes par la CITES sont inscrites à l’une des trois annexes de la Convention en fonction du degré de protection qu’elles nécessitent.
L’Annexe I comprend toutes les espèces menacées d’extinction ainsi que des espèces affectées ou pouvant être affectées par le commerce international. Le commerce de leurs spécimens n’est autorisé que dans des conditions exceptionnelles (par exemple, à des fins de recherche scientifique). Les orchidées inscrites à l’Annexe I sont : l’Aerangis elissi, le Dendrobium cruentum, le Laelia jongheana, le Laelia lobata, toutes les espèces de Paphiopedilum, le Peristeria elata, toutes les espèces de Phragmipedium et le Renanthera imschootiana. Sont nécessaires à leur commerce : un permis d’importation délivré (par le pays d’importation) si l’importation ne nuit pas à la survie de l’espèce et si l’autorité scientifique est sûre que le destinataire est convenablement équipé pour recevoir le(s) spécimen(s) et le(s) traiter avec soin ainsi qu’un permis d’exportation (ou certificat de réexportation) délivré par l’organe de gestion du pays d’exportation. Les plantes devront être mises en état et transportées de façon à éviter les risques de blessures ou de maladies. Les hybrides reproduits artificiellement peuvent être commercialisés s’ils sont couverts par un certificat de reproduction artificielle. Les graines, le pollen (y compris les pollinies), les fleurs coupées et les cultures de plantules et de tissus obtenues in vitro en milieu solide ou liquide et transportées dans des conteneurs stériles provenant de ces hybrides ne sont pas soumis à la CITES.
L’Annexe II comprend toutes les espèces qui ne sont pas nécessairement menacées d’extinction mais dont le commerce des spécimens doit être règlementé pour éviter une exploitation incompatible à leur survie. Le commerce international est autorisé sous réserve que chaque expédition soit accompagnée d’un permis valide. On y retrouve toutes les autres espèces d’orchidées mais ne sont pas pris en compte : les graines et le pollen (y compris les pollinies), les semis et les cultures de tissus obtenus in vitro en milieu solide ou liquide transportés dans des conteneurs stériles, les fleurs coupées provenant de plantes reproduites artificiellement de même que les fruits, leurs parties et produits, provenant de plants de vanille reproduits artificiellement. Les espèces de l’Annexe II demandent un permis d’exportation (ou un certificat de réexportation) qui sera délivré si le(s) spécimen(s) a(ont) été obtenu(s) légalement et si l’exportation ne nuit pas à la survie de l’espèce. Les plantes devront également être mises en état et transportées dans de bonnes conditions afin d’éviter tout risque de blessures ou de maladies.
Les hybrides reproduits artificiellement des genre Cymbidium, Dendrobium, Phalaenopsis et Vanda ne sont pas soumis aux dispositions de la CITES sous deux conditions : ils doivent être facilement reconnaissables comme ayant été reproduits artificiellement et ne présenter aucun signe d’une origine sauvage ; de plus, ils doivent respecter les règles d’expédition car si celles-ci ne sont pas suivies, les plantes devront être assorties des documents CITES appropriés. S’ils ne sont pas en fleurs, ils doivent être conditionnés par lots de 20 plants au minimum du même hybride. Les plantes de chaque conteneur doivent présenter une grande uniformité et un bon état de santé et les envois seront assortis de documents, telle une facture, indiquant le nombre de plants de chaque hybride. Si les plantes sont en fleurs lors de l’expédition (ce qui veut dire qu’au moins une fleur est ouverte par spécimen), un nombre minimal n’est pas requis par envoi mais les plantes doivent être traitées de façon professionnelle pour le commerce de détail (étiquette ou emballage imprimé).
Enfin, l’Annexe III comprend toutes les espèces protégées dans un pays qui a demandé aux autres Parties leur assistance pour en contrôler le commerce.
A noter que si le commerce international intervient avec un pays n’ayant pas adhérer à la Convention, des documents équivalents aux permis et certificats sont généralement acceptés, tels des certificats phytosanitaires pour les plantes.
L’Union-Européenne
Au départ, la CITES n’a prévu que l’adhésion de pays, pas celle de l’UE. Cependant depuis 2015, l’UE est officiellement la 181ème Partie de la Convention. La CITES est donc mise en œuvre dans l’ensemble de l’UE par le biais d’une règlementation applicable à tous les Etats membres.
Les espèces protégées se retrouvent dans une des quatre annexes de ce règlement.
L’Annexe A comprend les espèces inscrites à l’Annexe I de la CITES ainsi que certaines espèces inscrites aux Annexes II et III et des espèces non CITES pour lesquelles l’UE adopte des mesures plus strictes. L’utilisation des spécimens sauvages à des fins commerciales est interdite. Une autorisation est possible pour l’éducation, la recherche scientifique et la conservation des espèces. On y retrouve donc les orchidées inscrites à l’Annexe I ainsi que plusieurs orchidées européennes (Cephalanthera cucullata, Cypripedium calceolus, Goodyera macrophylla, Liparis loeselii, Ophrys argolica, Ophrys lunulata, Orchis scopulorum, Spiranthes aestivalis).
L’Annexe B comprend toutes les autres espèces inscrites à l’Annexe II de la CITES, certaines espèces de l’Annexe III et des espèces non CITES. Les orchidées ne se retrouvant pas dans l’Annexe A font donc partie de l’Annexe B.
L’Annexe C comprend les espèces inscrites à l’Annexe III et ne se retrouvant pas dans l’Annexe B ainsi que des espèces non CITES. Leur commerce est permis mais règlementé.
L’Annexe D comprend quelques espèces de l’Annexe III et des espèces non CITES pour lesquelles l’UE souhaite suivre les flux d’importation afin de pouvoir éventuellement les classer dans une autre Annexe où elles bénéficieront d’un plus grand degré de protection.
Les orchidées se retrouvent donc soit dans l’Annexe A, soit dans l’Annexe B. Pour importer des spécimens de ces annexes d’un pays tiers à la CITES vers l’UE, il faudra un permis d’exportation et un permis d’importation. De plus, les spécimens vivants de ces espèces ne peuvent être importées que si leur destinataire est correctement équipé pour en prendre soin. Pour les exporter de l’UE vers un pays tiers, un permis d’exportation est obligatoire. La circulation au sein de l’UE est libre mais il faut être en mesure de justifier l’acquisition légale de la marchandise. Pour les espèces de l’Annexe B une simple facture ou une copie jaune du permis d’importation suffit. Quant aux espèces de l’Annexe A un certificat intra-communautaire (CIC) est nécessaire. Des dérogations existent pour les plantes reproduites artificiellement. Certains établissements horticoles sont spécialisés dans la reproduction des espèces classées dans l’Annexe 1 à des fins commerciales et reconnus comme tels par la Convention. En Europe il s’agit de l’Azienda Agricola Nardotto e Capello et d’Asendorf Orchideenzucht.
La législation nationale
Les Etats peuvent prendre des mesures supplémentaires au niveau national. Il faut donc toujours s’adresser à l’organe de gestion des pays concernés.
Les limites de ces règlementations
Selon les pays, les contrôles sont plus ou moins stricts. Des permis de complaisance sont parfois délivrés après quelques faveurs accordées aux fonctionnaires. C’est ainsi qu’au commerce légal des orchidées sauvages s’ajoute malheureusement un important commerce illégal : certains collectionneurs recherchent des spécimens qui ne sont pas reproduits artificiellement ou des plantes inscrites à l’Annexe 1, par exemple.
90% du volume des orchidées du commerce international sont des orchidées reproduites artificiellement. Mais il est parfois difficile de différencier une plante reproduite artificiellement d’une plante prélevée dans la nature. Une plante est dite « reproduite artificiellement » si elle est produite dans des conditions contrôlées (mise en pots, traitements contre les nuisibles, protection contre le soleil, arrosages et fertilisation réguliers, etc.). Or il existe des plantes cultivées à l’extérieur (par exemple sur des caféiers). Elles ne peuvent donc être commercialisées en tant que plantes reproduites artificiellement puisque tous les paramètres de culture ne sont pas contrôlables et la distinction est parfois difficile avec des plantes sauvages.
Certains vendeurs proposent des plantes « wild collected ». Dans la plupart des cas, ces plantes ont été collectées de façon tout à fait légale. Elles ont été prélevées sur des sites destinés à la construction de routes, de barrages et d’exploitations de palmiers. Hélas, des collectes illégales existent aussi et il est quasiment impossible pour l’acheteur de connaitre la provenance exacte des plantes. Seule la crédibilité du vendeur est engagée.
En conclusion :
Le commerce des orchidées est très règlementé. Les espèces sont inscrites soit à l’Annexe I, soit à l’Annexe II de la CITES ou aux l’Annexes A et B de la législation de la Communauté Européenne. Un permis d’exportation et un permis d’importation sont généralement nécessaires pour l’achat de plantes à l’étranger même s’il existe certaines dérogations. Il est nécessaire également, avant tout achat, de se renseigner sur la législation nationale des pays concernés car une livraison non accompagnée des documents obligatoires et contrôlée par la douane peut mener à une condamnation ou à une forte amende.
CITES | UE | |||
Orchidées | Annexe I | Annexe II | Annexe A | Annexe B |
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Commerce international | Non sauf exceptions | Oui | Non sauf exceptions | Oui |
Permis d’importation | Oui | Non | Oui | Oui |
Permis d’exportation | Oui | Oui | Oui | Oui |
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Commerce intra-UE |
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| Certificat intra-communautaire | Preuve d’acquisition légale |
Contacts :
En Belgique :
SPF Santé publique, Sécurité de la Chaine alimentaire et Environnement
Service AMSZ – Cellule CITES
Place Victor Horta 40 boîte 10
1060 Bruxelles
cites@environnement.belgique.be
www.citesenbelgique.be (accès à la base de données CITES pour la demande de documents CITES en ligne)
En France :
Ministère de la Transition écologique et solidaire
www.ecologique-solidaire.gouv.fr/commerce-international-des-especes-sauvages-cites
En Suisse :
Office fédéral de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires (OSAV)
www.blv.admin.ch/blv/fr/home/das-blv/kooperationen/internationale-institutionen/cites.html
Sources